TORNADE DANS LA MARNE, LE 29 AVRIL 2018
Il y a de ces événements dont on a pu goûter enfin aux Etats-Unis, après les avoir tant enviés dans notre jeunesse, et qu’il nous paraît improbable d’observer en France. Ce n’est pas faute d’avoir vu parfois apparaître ça et là quelques images volées de superbes tornades dans notre beau pays. Tantôt causant des dégâts et surprenant à plus d’un titre les badauds, tantôt se présentant sous l’objectif averti d’un collègue chasseur. Pourtant, j’osais de moins en moins espérer avoir la chance d’en capturer une dans nos contrées, tant elles semblaient plus difficilement prévisibles que leurs homologues américaines. Alors c’est peu dire que je m’attendais encore moins à en croiser une lors de cette journée d’Avril, où le thermomètre peinait à atteindre les 15 degrés sur la région parisienne.
Quoi de mieux qu’un dimanche pour s’adonner à une sortie orageuse à moins de 2 heures de route, dans une masse d’air bien plus douce qu’à domicile ? Certes, mais j’avais prévu de travailler ce dimanche là, occupé à terminer le montage du documentaire La Force du Vent. J’eus cependant la chance inouïe de me trouver rapidement découragé par une tâche ingrate de ce processus de montage. Suffisant pour tout plaquer et embarquer en direction de l’est afin de profiter de ces températures plus clémentes et d’une possible dégradation orageuse. En fait, à y regarder de plus près, les modèles météo s’accordaient à voir un système orageux particulièrement costaud débouler sur la champagne en fin de journée. La méfiance est toujours de mise avec ces cartes aux teintes rouge fluo, mais la distance raisonnable à parcourir rendait la prise de risque très minime.
En attendant de me contenter de ce que la nature aurait à m’offrir, je profitais de mon arrivée en avance sur le lieu de chasse pour opérer une petite sortie du drone fraîchement acquis. Le colza étant aussi flamboyant que l’industrie éolienne dans ce secteur. Je prenais de la hauteur pour en témoigner au mieux.
Mais trêve de pilotage, le ciel se déstabilisant enfin plus au sud. Entre Auxerre et Troyes, un orage se renforçait nettement et fonçait vers le nord. Je savais qu’il faudrait l’intercepter en un point donné et que je n’aurais probablement aucune chance de l’accompagner dans son déplacement. Pendant près d’une heure, j’ajustais donc ma position, à mesure que la cellule remontait dans ma direction. Je me déplaçais jusqu’au dernier moment pour être sûr de me trouver à l’extrémité est de la ligne orageuse, là où le ciel serait le plus esthétique. Et ce n’est que lorsque le tonnerre grondait sévèrement sur la campagne, à quelques kilomètres de moi et quelques secondes après mon arrêt sur ce chemin de campagne, que la virulence de l’orage me frappait soudainement. Des flashs ininterrompus au sein d’une masse nuageuse hyper sombre et à la base proéminente. De là à m’attendre à ce qui allait arriver…
Ravi d’observer un orage aussi costaud pour la saison, je photographiais la structure dans son ensemble. En me penchant sur l’écran de l’appareil afin de vérifier la mise au point, une tâche m’intrigua sur le bas de l’image… comme un nuage de poussière. Je levai alors la tête et mon cœur s’arrêta instantanément. NO WAY! Une tornade ! Il y a une tornade devant moi ! Panique à bord pour tenter de photographier et filmer l’événement sans faire les erreurs les plus regrettables de ma petite « carrière ». La tornade n’était pas totalement condensée mais elle fit tourbillonner un beau nuage de poussière.
Tout se déroula très vite et il fut difficile d’en profiter tant je me concentrais pour suivre le déplacement de l’engin sur l’écran de l’appareil. En moins de deux minutes, la tornade se décalait de quelques centaines de mètres vers la droite et finissait par disparaître, sous un mésocyclone et un nuage-mur toujours très menaçants.
Pris dans le feu de l’action, et sans avoir encore trop réalisé ce à quoi je venais d’assister, je tenterai par la suite de précéder l’orage dans sa remontée vers le Nord. Mais il n’y avait rien à faire, celui-ci était trop rapide. Ma chance aura été de l’intercepter à son moment paroxysmique menant à l’apparition de cette tornade. Une p***** de tornade !
Keraunos classera finalement cette tornade EF0. Elle ne provoqua d’ailleurs que de légers dégâts sur la végétation. On pouvait se douter de la relative « faiblesse » des vents au vu des images capturées. L’événement n’en reste pas moins un grand souvenir pour moi et un moment d’excitation rarement ressenti en France. A refaire !
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